Engins sous-marins : histoire et puissance française
Les profondeurs marines fascinent autant qu’elles défient la technologie. Pour les explorer, les surveiller ou les défendre, l’humanité a mis au point de puissants engins capables d’évoluer sous la surface des océans. Sous-marins militaires, drones autonomes, planeurs de collecte de données… dans cet article, on plonge dans l’univers des engins sous-marins, de leurs origines aux innovations françaises les plus récentes.
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Qu’est-ce qu’un engin sous-marin ?
Un engin sous-marin désigne tout appareil capable de se déplacer ou de rester stationnaire sous l’eau, avec ou sans intervention humaine à bord. Il peut être habité ou autonome, militaire ou civil, et remplir une variété de missions : exploration, renseignement, dissuasion, recherche scientifique ou surveillance environnementale.
Une invention ancienne, aux usages modernes
L’idée d’explorer les profondeurs marines remonte à plusieurs siècles. Le premier sous-marin militaire opérationnel français, le Gymnote, voit le jour en 1887. Long de 17 mètres, il était déjà électrique et armé de torpilles, une prouesse technique pour l’époque.

Mais l’invention du sous-marin, au sens large, remonte à bien plus loin : Cornelis Drebbel, ingénieur néerlandais au service de l’Angleterre, est souvent crédité du premier prototype submersible fonctionnel vers 1620. Depuis, les engins sous-marins ont connu une évolution fulgurante, accélérée par les enjeux militaires du XXe siècle et les besoins scientifiques du XXIe.
Les grandes catégories d’engins sous-marins
Les engins sous-marins peuvent être regroupés en trois grandes familles :
1. Les sous-marins habités
Ce sont les plus connus, notamment les sous-marins militaires. Ils embarquent un équipage, une propulsion, des armements et une autonomie pouvant atteindre plusieurs mois. Ils sont utilisés pour la dissuasion, le renseignement ou les missions de combat.
2. Les drones sous-marins autonomes
Ces engins sans équipage, appelés AUV (Autonomous Underwater Vehicles), sont conçus pour collecter des données océanographiques, surveiller les fonds marins ou repérer des anomalies. Ils peuvent parcourir des milliers de kilomètres sans assistance humaine directe.

3. Les planeurs sous-marins
Moins connus, les planeurs sous-marins représentent une innovation de rupture. Leur mouvement lent et leur autonomie exceptionnelle les rendent parfaits pour des missions longues de collecte de données environnementales à moindre coût.

Focus : le planeur sous-marin, l’œil silencieux de l’océan
Parmi les engins autonomes, le planeur sous-marin se distingue par ses capacités remarquables. En France, ALSEAMAR est la seule entreprise à en fabriquer.
Les caractéristiques d’un planeur sous-marin :
- Autonome, il ne nécessite aucune intervention humaine pendant sa mission
- Capable de parcourir jusqu’à 1900 km sans rechargement
- Peut rester actif pendant 75 jours
- Plonge jusqu’à 1000 mètres de profondeur
- Léger et compact : entre 1,5 m et 2 m de long, 50 à 70 kg
- Coût unitaire : environ 200 000 € (bien moins cher qu’un navire pour les mêmes relevés)
Grâce à son endurance, le planeur permet d’obtenir des séries de données continues, idéales pour les recherches climatiques ou l’observation marine. Une vraie révolution dans l’étude des océans.

Les sous-marins militaires : le cœur de la dissuasion française
La France est l’une des rares nations à posséder une flotte complète de sous-marins nucléaires. En tout, 10 sous-marins composent aujourd’hui la force sous-marine française, divisés en deux catégories principales.
1. Les SNLE : Sous-marins Nucléaires Lanceurs d’Engins

Les SNLE forment le pilier de la force de dissuasion nucléaire française. Leur mission ? Rester en plongée pendant des semaines, en toute discrétion, et assurer une capacité de riposte immédiate en cas d’attaque.
- Nombre : 4 unités
- Noms : Le Triomphant, Le Téméraire, Le Vigilant, Le Terrible
- Dimensions : 138 m de long / 12,5 m de large
- Poids en plongée : 14 200 tonnes
- Profondeur max : 300 m
- Équipage : deux équipes tournantes de 110 marins
- Spécificité : embarquent des missiles balistiques à têtes nucléaires multiples
2. Les SNA : Sous-marins Nucléaires d’Attaque
Les SNA sont plus petits, plus rapides et plus maniables. Ils n’emportent pas d’armes nucléaires mais sont essentiels à la dissuasion conventionnelle et aux opérations militaires : chasse d’autres sous-marins, missions de renseignement, tir de torpilles…
- Nombre actuel : 6 unités
- Noms connus : Émeraude, Améthyste, Perle
- Dimensions : 73,6 m de long / 7,6 m de large
- Poids en plongée : 2 670 tonnes
- Profondeur max : 300 m
- Équipage : deux équipes de 70 marins

Une nouvelle génération en marche : le programme Barracuda

Pour renforcer sa flotte, la France mise sur les SNA de type Suffren, conçus par Naval Group. Ce programme prévoit 6 nouveaux sous-marins nucléaires d’ici 2030, plus silencieux, plus endurants et mieux armés.
- 5 nouveaux SNA Suffren sont en cours de livraison d’ici 2028
- Un nouveau bassin d’accueil a été inauguré en juillet par le ministre des Armées à Toulon (bassin Missiessy n°2)
- Objectif : accueillir, entretenir et moderniser cette nouvelle génération
Ce Programme d’infrastructure Accueil Soutien Barracuda (PI ASB) s’inscrit dans une vision à long terme, avec des travaux s’étalant sur 15 ans pour moderniser les infrastructures.
Les engins sous-marins, un enjeu stratégique pour demain
Des planeurs silencieux aux sous-marins nucléaires, les engins sous-marins représentent aujourd’hui bien plus que de simples machines : ce sont des outils stratégiques, scientifiques et technologiques au service des États, de la recherche et de l’environnement.
La France, avec Naval Group et ALSEAMAR, fait partie des rares pays capables de concevoir, construire et opérer ce type d’engins. Dans un monde où la mer devient un enjeu géopolitique majeur, la maîtrise des profondeurs n’a jamais été aussi stratégique.